Le jeu, levier pour construire et mobiliser sa compétence culturelle.


Cette réflexion s’appuiera sur deux séquences de collège dont voici une brève présentation.

  1. Classe de 4e : Descríbeme tu casa y tu lugar de vida, y adivinaré dónde vives.

Contexte :
Séquence proposée au collège, en début d’année, en classe de 4ème.

Notions :
Rencontre avec d’autres cultures - Ecole et société.

Activités langagières dominantes :
Compréhension de l’écrit et expression écrite.

Objectif culturel de la séquence :
Reconnaître un habitat ou un lieu par l’évocation de ses caractéristiques principales.

Supports travaillés en classe :
• Séance 1 : Casas emblemáticas del mundo hispánico (Fotos de casas coloniales de la Habana vieja – La casa Milà en Barcelona – La casa Batlló en Barcelona – Las casas coloridas del Barrio de la Boca en Buenos Aires – Las casas blancas y asomadas al precipicio de Ronda – Las casas colgadas de Cuenca – Las casas cuevas de Guadix). Dans ce diaporama, les élèves découvrent des caractéristiques de ces lieux emblématiques.

• Séance 2 : Visiones de campos y ciudades (Antonio Seguí, Sentirse solo, 2012 et Fausto Pérez, Paísaje de campo, 2013). Ici dans ces tableaux, les élèves ont deux visions différentes proposées par les peintres. Le premier tableau offre une vision pessimiste de la vie en ville. Le second nous offre au contraire une vision idyllique de la vie à la campagne.

• Séance 3 : Patios cordobeses (article du site veintemundos sur le Festival des Patios, rejas y balcones). Dans cet article de Carment Boronat, les élèves découvrent les enjeux du Festival de patios, balcones y rejas de Córdoba ainsi que le travail des habitants pour entrer dans la compétition. Ils apprennent ainsi à reconnaître les différents éléments présents dans les patios : macetas, flores, pozos, fuentes, balcones, rejas, estatuas…

• Séance 4 : ¡Más de 3100 Santiagos en el mundo ! (pages 34-35 du manuel Nuevo ¡apúntate ! 2ème année 2012). Dans cette étape, nous découvrons que nombre de villes portent le même nom, malgré une situation géographique totalement différente. L’évocation des paysages les entourant permet cependant de deviner de quel Santiago il s’agit. L’évocation d’une petite ville au bord de l’Océan Pacifique, d’une mégalopole capitale installée entre la Cordillère des Andes et l’Océan Pacifique, et d’une ville espagnole point d’arrivée du fameux camino de Santiago, et de toutes leurs caractéristiques permettra aux élèves de les reconnaître.

• Séance 5 : El teleférico de La Paz (article du site veintemundos, Milen Saavedra, La Paz, Bolivia). L’article évoque la ville de La Paz et de El Alto, ainsi que leurs problèmes de circulation, et met en avant le téléphérique comme alternative plus propre afin d’éviter les embouteillages. C’est l’occasion d’évoquer l’altitude des villes de ces villes pour comprendre aussi l’utilité, l’intérêt du téléphérique.

• Séance 6 : Elige un lugar ideal para vivir (pages 52-53 ¿El lugar ideal para vivir ? du manuel Vamos allá 4e 2017). Quatre lieux de vie totalement différents sont présentés ici. Chaque îlot en découvre un et doit le présenter aux autres. Ces lieux sont Medellín, le village de Quillagua dans le désert d’Atacama, les îles flottantes du Lac Titicaca et les palafitos dans la jungle du Panama. Les élèves y découvrent les caractéristiques visuelles mais pour aller au-delà, ils découvrent aussi des éléments relatifs aux conditions de vie. Chacun pourra, suite à la présentation des quatre lieux de vie, dire où il pourrait/aimerait vivre, ou au contraire où il ne voudrait pas habiter. Quel est pour eux l’endroit, idéal pour vivre ?

Projet de fin de séquence :
Création d’un plateau de juego de la oca par chacun des îlots de la classe. Chaque groupe va préparer, à l’écrit, une série de sollicitations pour son propre plateau de jeu qui, leur permettra de mobiliser les connaissances culturelles acquises pendant la séquence, et permettra de tester celles des autres élèves. Au terme de la création du juego de la oca, chaque équipe jouera avec un jeu créé par une autre équipe.
Pour que ce projet soit un succès, le projet de fin de séquence doit être évoqué, décrit, expliqué et explicité dès le début de la séquence. Les phases de rédaction de chaque case du jeu faisant suite à chaque séance, sont des phases d’expression écrite permettant de mobiliser les découvertes culturelles, et donc d’en construire la compétence. Ces connaissances peuvent être mobilisées lors de la reprise. Elles pourraient de la même façon être la base d’une évaluation d’expression écrite qui donnerait aux élèves une occasion encore de mobiliser l’ensemble de leurs connaissances sur un ou plusieurs lieux évoqués.

  1. Classe de 3e : La España contemporánea, un siglo de cambios y cambios.

Contexte :
Séquence proposée au collège, en classe de 3e, en milieu ou fin d’année.

Notions :
Voyages et migrations - Ecole et société.

Activités langagières dominantes :
Compréhension et expression écrite.

Objectif / compétence culturelle à construire :
Quels sont les grands changements vécus dans l’Espagne contemporaine et leurs conséquences sur la vie de ses habitants ?

Supports travaillés en classe :
• Séance 1 : La Guerra Civil y la dictadura (page 74 du manuel Trotamundos 3e, 2017). Sur cette page, les élèves découvrent la chronologie des évènements majeurs en Espagne, entre 1931 et 1975. La création d’une chronologie est la base de la première phase de rédaction des questions.
• Séance 2 : Madre, anoche en las trincheras (paroles de la chanson interprétée par Raquel Eugenio). Le travail de repérage dans les paroles de cette chanson permet aux élèves de se rendre compte de ce qu’est une guerre civile, qui en vient même à opposer les meilleurs amis d’enfance.
• Séance 3 : Vivir durante la dictadura (Hay que vivir page 75 du manuel Trotamundos, 2017). L’extrait présenté ici, de El tragaluz de Antonio Buero Vallejo condense en quelques lignes l’histoire des protagonistes éclairant le lecteur sur les conditions de vie en un sótano pendant la guerre civile et plus tard pendant la dictature.
• Séance 4 : La transición democrática y la movida (page 76 du manuel Trotamundos 3e, 2017). À la lecture de cet article, chaque élève peut reconstituer la chronologie 1975-1985, donner la définition de la Movida et présenter Pedro Almodóvar, emblématique producteur de cinéma de cette période.
• Séance 5 : Una España democrática y monárquica (page 78-79 du manuel Trotamundos 3e, 2017). Cette dernière étape de la séquence décrit la transition monarchique entre Juan Carlos I et Felipe VI. Elle présente aussi la figure et la famille du nouveau roi d’Espagne.

Projet de fin de séquence :
Le projet de fin de séquence est pensé de la même manière que celui des 4e dans la séquence précédemment décrite. Création d’un plateau de juego de la oca par chacun des îlots de la classe. Chaque groupe va donc également préparer son propre plateau de jeu qui permettra de mobiliser les connaissances culturelles acquises pendant la séquence et de tester celles des autres élèves. Ces phases de rédaction font suite aux différentes séances de cours, et sont la base du rappel de cours. Au terme de la création du juego de la oca, chaque équipe jouera avec un jeu créé par une autre équipe.

  1. Deux scenarios différents mais un dénominateur commun : le jeu.

Scenario pour la séquence des 4èmes :
Chaque étape de la séquence permet de découvrir des lieux variés du monde hispanique, d’Espagne ou d’Amérique hispanique. Les caractéristiques de ces milieux et de leurs habitats, souvent conséquences de leur situation géographique, permettent de comprendre celles des habitats découverts.

La fixation des découvertes culturelles passe, tout au long de la séquence, par :

  La découverte. A la vue d’une photo des casas blancas asomadas al precipicio de Ronda, il est essentiel d’écouter les premières impressions des élèves, leur ressenti à la découverte de lieux nouveaux. Suivra la description, phase nécessaire à la réflexion et la compréhension des caractéristiques (blancas / asomadas al precipicio).
  La réflexion, l’interprétation. Suite à la description, une discussion est nécessaire pour avancer des hypothèses pour expliquer ce que l’on voit. On invitera les élèves à s’interroger sur la couleur et la localisation des maisons.
  La communication, l’explication. Elles permettent de s’interroger et de récapituler comprendre ces caractéristiques propres à une réalité géographique : las casas son blancas para protegerse del calor porque…
  La rédaction des questions ou des indices qui permettront dans le jeu, de deviner de quel lieu il s’agit. C’est la phase d’expression écrite, en fin de cours en classe ou à la maison, de mobilisation des acquis (culturels et linguistiques). La langue est alors, dans l’expression écrite, au service du culturel. Soy una ciudad del sur de España, en Andalucía, en la provincia de Málaga. Mis casas típicas son blancas y asomadas al precipicio. Soy….

Scenario pour la séquence des 3èmes :
L’objectif culturel majeur de cette séquence est d’avoir une idée de la chronologie des évènements historiques de l’Espagne contemporaine dans ses grandes lignes, en allant de la Seconde République au couronnement de Felipe VI. Il s’agit de comprendre et mémoriser ces grands évènements et leur enchaînement et de savoir en expliquer les grandes lignes : La Segunda República / La Guerra Civil / La Dictadura / La Transición / La España democrática y monárquica. Il est par ailleurs important d’en connaître les grands protagonistes (groupes et personnes).

Une fois encore, nous passerons de la découverte culturelle, à la réflexion, l’interprétation des termes, des images…, à la communication entre pairs, l’explication des faits, des changements ou bouleversements, à la phase d’expression écrite pour mobiliser les acquis.

Tout ceci se déroule en gardant en tête qu’il s’agit d’une classe de fin de cycle 4. S’il n’est donc pas nécessaire d’être très exhaustif, il faut cependant donner les clés pour anticiper ce qui pourrait être vu au Lycée.

Constats et questions.
L’évaluation du projet de fin de séquence ou à tout autre moment de celle-ci (à l’oral ou à l’écrit, rappel de cours ou évaluation sommative) permet de mesurer le degré de mobilisation linguistique et culturelle des élèves. Si la langue a une place importance dans le barème retenu, il faut bien entendu garder une place toute aussi essentielle à la mobilisation des acquis culturels.

Qui d’entre nous n’a pas fait le constat, à la découverte de productions d’élèves, du manque de restitution des acquis culturels ? Si la « grande porte » de la séquence est l’entrée culturelle, il s’agit de mobiliser les acquis culturels tout au long de la séquence.

La conception de la séquence et sa problématisation doivent donc permettre aux élèves de découvrir des faits culturels, de réfléchir pour les comprendre, et de communiquer ensemble pour se cultiver. Ce modèle de conception de séquence va créer un équilibre nécessaire dans la mobilisation des objectifs langagiers et culturels. On peut apprendre aux élèves à se questionner en termes simples, ce qui revient à faire état de ce qu’ils ont découvert grâce à la/les séquence(s), qu’ils ne connaissaient pas encore. Ils peuvent apprendre à mettre en perspective les supports (points communs, différences, invariants, ...) et à s’interroger, y compris sur des choses complexes. De cette façon, les langues vivantes contribuent à la formation des esprits critiques des futurs citoyens.

Evaluation et entraînement.

Évaluation :
Si la part du culturel est importante, il nous appartient donc de la tester, de l’évaluer. Prenons par exemple le rappel de cours : Ne peut-il / ne doit-il pas être une étape qui permet aux élèves de mobiliser et mettre en avant leurs acquis culturels ? Comment procéder ?
Nous pouvons par exemple afficher dans la classe ou vidéo projeter ce document de base à la communication ou l’évaluation de cette étape.

Cette étape du cours doit nécessairement être un moment de mobilisation des acquis culturels pendant lequel la langue est au service de la culture. Dans le cas de nos deux séquences, nous pouvons aussi prendre appuie sur les questions rédigées par les groupes pour préparer le projet de fin de séquence.
La ou les évaluations de la séquence doit (doivent) permettre aux élèves de mettre en avant leurs acquis culturels, de les mobiliser dans les activités proposées. Une fois encore c’est la culture qui est mise en avant, et la langue (manipulée auparavant par les élèves et utilisée par le professeur comme modélisante) est donc alors au service de la culture.

Entraînement.
L’entrée dans un support, quel qu’il soit (texte, audio, vidéo), doit permettre à l’élève de découvrir et comprendre l’apport culturel, en s’appuyant sur le support. Dans ce sens, le titre donné à la séance par le professeur a sans doute un rôle important pour éviter le questionnement, le « vrai ou faux » ou toute autre activité plutôt destinée à évaluer.

Nous pouvons ainsi ne donner qu’une ou deux pistes de recherches à nos « élèves enquêteurs  » afin de les mettre sur la voie de ce qu’ils doivent repérer, comprendre, interpréter et restituer. Prenons l’exemple du travail de compréhension de l’écrit avec les 3e sur la deuxième séance : les paroles de la chanson Madre, anoche en las trincheras. Plutôt donc que de proposer aux élèves de trouver les réponses à une liste de questions, faisons d’eux des enquêteurs, journalistes, s’appuyant sur les repérages dans le texte. Proposons-leur une piste comme Amistad y guerra civil. Il leur revient alors de chercher les indices dans les paroles qu’ils peuvent relier ou opposer à cette piste. L’élève devient ainsi acteur de la construction de sa compétence culturelle. Conférer ce rôle d’enquêteur aux élèves pour entrer dans tous les documents leur permet aussi de développer des stratégies de compréhension propre à chaque type de document.

Pour que l’élève prépare et réussisse cette étape, le jeu peut être un levier qui permette aux élèves de construire et de mobiliser sa compétence culturelle. Nous pouvons également envisager de créer ou faire créer par les élèves des jeux simples ou plus complexes comme celui-ci créé par les 4e, ou bien encore celui-là créé lui, par les 3e. Faisons confiance aux élèves, ne faisons pas toujours à leur place !

Mots croisés, séquence 4e, créé sur learning apps.

Activité, séquence 3e, créés sur learning apps.

La phase de test des jeux créés par les élèves.

Juego de la oca créé par un groupe de 4èmes sur genially.

Juego de la oca créé par un groupe de 3èmes.

Il est indispensable de consacrer du temps à cette phase. Le but ultime de la séquence est de tester, donc de jouer. Il ne faudrait surtout pas que la séquence suivante ne débute sans qu’on ne passe du temps à tester les jeux. Créer un jeu sans jouer serait aussi incohérent qu’étudier une chanson sans la chanter ! Le ludique n’a de sens que s’il est au service de l’apprentissage.

Nous procédons ainsi : chaque groupe va tester le jeu créé par d’autres. Et il s’agit bien d’une phase de jeu, pas d’évaluation, même si bien entendu, pour répondre correctement aux questions, les élève doivent mobiliser leurs connaissances culturelles.

L’utilisation d’outils numériques permet un travail de conception plus aisé que lorsque ce jeu était créé en version papier. Celui utilisé permet l’insertion de photos, d’audios ou de vidéos en plus des questions posées par les élèves.

Lors d’une formation sur le numérique, une étudiante nous avait montré le jeu de l’oie qu’elle avait créé pour les élèves en utilisant Genially. Nous avons repris ici son idée et le squelette de son jeu de l’oie pour la séquence de 4e.

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Publié le
par Gérald Moreau